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Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: YK (IP Loggée)
Date: 20 mai 2012 à 21h09

Bonjour,



Deux points m’échappent:




  • Comment sommes-nous passé de la crise des subprimes à la crise des dettes publiques ? Est-ce que cette évolution de la crise financière de 2008 était prévisible ?


  • Pourquoi les gouvernements actuels appliquent-ils des politiques d’austérité ? En quoi sont-elles indispensables ? Quelles auraient été les conséquences de leur non mise en place ?




Désolé pour le caractère très certainement simplissime de ces questions, mais le néophyte en économie que je suis n’a malheureusement pas trouvé de réponses suffisamment techniques et approfondies dans la presse généraliste.



Je vous remercie.



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: Optimum-Belgo (IP Loggée)
Date: 21 mai 2012 à 01h01

Hey, ça fait pas deux questions, ça, mais 5 !



Ces questions sont bonnes, et je doute qu'elles soient consensuelles parmi les économistes. Je lance un peu des pistes en espérant que ça suscite des débats.



"Comment sommes-nous passé de la crise des subprimes à la crise des dettes publiques ?"



La crise des subprimes paralyse le crédit, et donc les dépenses d'investissement et certaines dépenses de consommation.
Or au niveau macroéconomique, cette baisse des dépenses entraîne une diminution du revenu national (puisque le revenu vient de la production, qui elle-même dépend des dépenses des agents économiques). Donc, premier phénomène (1) le revenu national diminue.
Or, les recettes fiscales dépendent du revenu national (si votre revenu baisse, vous paierez moins d'impôts. C'est également vrai au niveau macroéconomique), donc, (2) les recettes publiques diminuent. De plus, (3) un certain nombre de dépenses publiques augmentent en période de crise : certaines automatiquement (les allocations chômages...), d'autres en réponse à la crise (les Etats mettent en place des plans de relance pour que la dépense publique se substitue à la dépense privée).
Finalement, si on étudie le ratio (dette publique)/(revenu national), le numérateur augmente à cause de (2) et de (3), tandis que le dénominateur diminue à cause de (1). De là nait la crise des dettes publiques.



"Est-ce que cette évolution de la crise financière de 2008 était prévisible ?"



Oui et non. Oui parce que le mécanisme est assez bien compris par les économistes. Non car d'autres scenarii auraient pu se produire. Notamment une politique monétaire plus réactive des banques centrales aurait peut-être permis d'éviter que la crise financière ne se transforme en crise économique.



"Pourquoi les gouvernements actuels appliquent-ils des politiques d’austérité ? "



Pour les Grecs, ça va de soi.
Pour les autres, ils sont vraisemblablement guidés par la peur que des doutes finissent par s'installer sur leur solvabilité. Pour l'instant, ça n'est pas le cas (ils empruntent à des taux d'intérêt très bas, preuve que les marchés financiers leur font confiance). Mais dans la mesure où il existe une certaine inertie dans les dépenses publiques, ils préfèrent viser un retour vers l'équilibre dès maintenant plutôt que de prendre le risque d'avoir à le faire violemment dans quelques années.



"En quoi sont-elles indispensables ?"



Sauf pour la Grèce, elles ne le sont pas vraiment. Il y a à ce sujet un petit paradoxe : les pays membres de la zone euro qui connaissent une conjoncture défavorable ne disposent pas d'une politique monétaire adaptée à leur situation, si bien que la dépense publique peut être vue comme un substitut attractif pour stimuler l'activité. En même temps, l'appartenance à la zone euro implique une certaine rigueur pour la raison suivante : les pays les plus en difficultés peuvent être tentés de créer du déficit, au risque de se trouver un jour dans la situation de demander à la banque centrale de les aider, ce qui risque de créer de l'inflation, y compris pour les pays qui auront été les plus rigoureux. On comprend donc la volonté des pays membres de se controler les uns les autres.



"Quelles auraient été les conséquences de leur non mise en place ?"



Version optimiste : des déficits plus élevés auraient permis de créer de la croissance, accélérant la sortie de crise.
Version pessimiste : ça aurait créé une défiance sur les finances publiques, entraînant une flambée des taux d'intérêt, et créé un climat d'incertitude décourageant l'investissement, renforçant la crise.



Et oui, c'est un peu décevant que l'on ne puisse pas trancher avec certitude entre ces deux réponses pourtant radicalement opposées, mais un conseil : méfiez-vous de ceux qui sont trop sûr d'eux sur ces questions !



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: joff (IP Loggée)
Date: 21 mai 2012 à 09h09

"Pourquoi les gouvernements actuels appliquent-ils des politiques d’austérité ? "



Pour les Grecs, ça va de soi.



Je connais des économistes comme Vincent Duwicquet ou Jacques Mazier qui n'ont pas le même point de vue...C'est vrai qu'il est difficile d'aboutir à un consensus sur ces questions mais dire qu'il n'y a pas d'autres alternatives c'est faux. D'autres politiques sont envisageables
-Tranfert budgétaire de l'UE vers la Grèce
-Sorti de la Grèce de la zone euro par exemple.
Il s'agit la des réponses à la crise conjoncturelle (dette).



En ce qui concerne les politiques de réponses à la crise structurelle je passe mon tour. Je suis d'accord av Optimum, une réforme de la fiscalité s'impose etc etc. Même si la encore, il y a débat



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: elvin (IP Loggée)
Date: 21 mai 2012 à 10h10

allez, tiens, j'y vais de quelques réponses



Comment sommes-nous passé de la crise des subprimes à la crise des dettes publiques ?
La crise des subprimes et les crises des dettes publiques en Europe sont des évènements indépendants. Il pouvait y avoir crise de la dette grecque sans crise des subprimes, et crise de la dette espagnole sans crise de la dette grecque.
Mais les effets de ces différentes crises se combinent, d'une part quand des établissements financiers détiennent des obligations et/ou des titres de dette de ces différentes origines, et d'autre part à travers le mécanismes de la zons euro.



Est-ce que cette évolution de la crise financière de 2008 était prévisible ?
Oui qualitativement. On savait que la bulle des subprimes devait exploser un jour, comme l'a fait la bulle internet. On savait aussi qu'aucun pays (ou toute autre organisation) ne peut vivre éternellement au-dessus de ses moyens. Donc toutes ces folies devaient avoir une fin. Mais là non plus, on ne peut connaître ni le jour ni l'heure.



Pourquoi les gouvernements actuels appliquent-ils des politiques d’austérité ? En quoi sont-elles indispensables ?
Essentiellement parce que personne et aucun groupe de personnes, quelle que soit la façon dont il est organisé et quel que soit le nom qu'on lui donne (entreprise, pays, etc.) ne peut durablement consommer beaucoup plus qu'il produit. S'il arrive à le faire un certain temps grâce à la bienveillance d'autres personnes ou groupes, il se fabrique un double problème:
1. il prend de mauvaises habitudes, et quand il faudra revenir à un niveua de consommation compatible avec sa production, il trouvera que c'est de l' "austérité"
2. si en plus ceux qui lui ont permis de vivre au-dessus de ses moyens demandent le remboursement des dettes, ça sera la double peine car il va alors falloir consommer moins que ce qu'on produit



Quelles auraient été les conséquences de leur non mise en place ?
Une austérité encore plus grande à l'avenir, probablement totalement insupportable
On peut dire que les politiques d'austérité sont nécessaires parce qu'on n'a pas fait à temps des politiques de rigueur. Un contre-exemple est l'Allemagne, qui peut aujourd'hui éviter l'austérité parce qu'elle a été rigoureuse à temps.



PS: pas mal d'économistes, depuis Keynes, se sont donné beaucoup de mal pour faire croire que tout ça n'est pas vrai, et notamment que les gouvernements peuvent s'en tirer en manipulant la monnaie. On voit maintenant ce qu'il en est.



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: joff (IP Loggée)
Date: 21 mai 2012 à 11h11

A elvin,



Je ne suis pas d'accord avec le troisième point... Les plans d'austérité sont à la charge des populations alors qu'elles ne sont en rien responsables de la crise! L'endettement est la résultante d'une administration soucieuse de maintenir sa consommation ostentatoire et de financer un budget militaire hors norme. Pourquoi les populations devraient-elles payer pour une dette qui ne les a pas servis? Mettre tout le monde dans le même panier, pour un autrichien qui prône la complexité, c'est un peu contradictoire!



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: elvin (IP Loggée)
Date: 21 mai 2012 à 11h11

@joff
C'est en effet plus compliqué. Les "folies" que je dénonce, et qui fabriquent progressivement la future crise, profitent souvent aux populations que leur gouvernement croit ainsi satisfaire dans l'instant, ou dont il achète les voix avec la dette. On peut penser que si les gens avaient su, ça se serait passé autrement, mais en attendant ils ont voté pour ces gouvernants là, et les auraient probablement renvoyés s'ils avaient gouverné avec la rigueur nécessaire. Au total, les populations sont en partie responsables à travers leurs choix politiques, et ont bénéficié au moins en partie des largesses inconsidérées de leur gouvernement. Personne n'est innocent.
A la racine de tout ça, il y a l'ignorance des mécanismes les plus élémentaires de l'économie chez les électeurs de base.



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: joff (IP Loggée)
Date: 21 mai 2012 à 11h11

La question que vous posez est celle de la souveraineté des individus. Sans vouloir offenser, je n'y crois pas.
Dans tout les cas, il n'y aucune raison que les travailleurs grecs qui sont en règles avec le système fiscal doivent payer pour une crise qu'ils n'ont pas déclenché. Je suis bien d'accord que certaines catégories de la population ont largement profité des largesses de l'Etat: les armateurs et l'Eglise entre autres mais ca ne justifient pas la dureté de la répression économique. Par ailleurs, quand vous affirmez que les plans d'austérité sont la seule issue possibles, je me permets de vous renvoyer aux excellents billets de Cyril Hédoin sur le phénomène des causalités cumulatives. En substance, les conséquences des plans d'austérité seront irréversibles: dé qualification etc.



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: Optimum-Belgo (IP Loggée)
Date: 21 mai 2012 à 11h11

@Joff : quand je dis "ça va de soi", je ne dis pas qu'il n'y a pas d'alternative en principe. Si demain les grecs veulent que leur gouvernement soit mis sous tutelle de la commission européenne où s'ils veulent sortir de l'euro, ça changera la donne. Mais que la réponse immédiate à une telle défiance des marchés sur la dette grecque ait été une cure d'austérité me semble aller de soi.



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: elvin (IP Loggée)
Date: 21 mai 2012 à 11h11

@joff
Je ne suis pas en désaccord avec vous, mais en bon autrichien je pense que les crises sont la conséquence inéluctable des bulles. Autrement dit, le mal est fait et est irréversible AVANT que la crise se déclenche. Et les responsables ne sont pas ceux qui ont déclenché la crise, mais ceux qui en ont construit les conditions en gonflant ou en laissant se gonfler les bulles. Je dirais même que plus une crise se déclenche tôt et moins elle risque d'être grave, et que donc paradoxalement ceux qui la déclenchent rendent service, puisque sinon elle se serait déclenchée plus tard et elle aurait donc été pire. L'idéal serait que des micro-crises se déclenchent dès qu'apparaissent des micro-bulles, ce qui se passerait vraisemblablement en l'absence d'intervention gouvernementale.
Une fois la crise déclenchée, il ne peut pas y avoir de solution indolore. Mais en tous cas il faut commencer par ne plus faire ce qui a conduit à la crise, sous peine de recommencer en pire dans quelques années.



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: MacroPED (IP Loggée)
Date: 21 mai 2012 à 15h03

en passant pour le point 1 de la question, [www.unmondelibre.org]



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: G_Gekko (IP Loggée)
Date: 23 mai 2012 à 11h11

Je me permets d'apporter mon grain de sel car il y a eu des oublis



Comment sommes-nous passé de la crise des subprimes à la crise des dettes publiques ?



Optimum belgo vous a donné en partie la solution. A cela on peut rajouter que les dérives présentent aux usa étaient aussi présentes en Europe : bulle immobilière, forte expansion du crédit privé ; la bulle a eclaté et les ménages sont en difficulté pour rembourser a cause de la crise ca fait mal
il y a eu aussi de forts investissements des pays du nord vers les pays du sud, et quand la crise est arrivée, ces investissements se sont brutalement arretés
enfin les taux d'intéret payés par les etats font sujet de débat, certains économistes clamant que ces derniers sont fixés de manière réflétant peu le risque réel des défauts de paiement



Est-ce que cette évolution de la crise financière de 2008 était prévisible ?



ils vous ont oublié de préciser que dès le début l'euro a été critiqué car nous ne sommes pas dans ce que l'on appelle une zone monétaireoptimale
pour pouvoir mettre en place une monnaie unique, il faut que des ajustements macroéconomiques se fassent; or ils ne se font pas et c'est en partie la cause de la crise actuelle
ca c'était prévisible



Pourquoi les gouvernements actuels appliquent-ils des politiques d’austérité ? En quoi sont-elles indispensables ? Quelles auraient été les conséquences de leur non mise en place ?



il n'a pas été mentionné que certains économistes ainsique JC Trichet par exemple ont prétendu que ces politiques permettraient de relancer la croissance en Europe. Comme dit optimum belgo personne ne peut savoir ce qui se serait passé si elles n'avaient pas été mises en place mais une chose est a peu pres sure, l'austérité a conduit a la recession actuelle



Modifié 1 fois. Dernière modification 23/05/2012 à 11h11 par G_Gekko.



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: G_Gekko (IP Loggée)
Date: 26 mai 2012 à 08h08

scusez moi, quelqu'un a un lien envers le rapport du FMI sur les politiques de consolidation budgétaire faites par le passé ?



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: Citoyen (IP Loggée)
Date: 26 mai 2012 à 22h10

Quand on parle de politique d'austerité, il faut comme même avoir en tête de quoi on parle. Un pays comme l'Espagne a en ce moment un deficit budgétaire de 8,5% (le RU 8,3%, Irlande 13,1%, Grèce 10,6%) du PIB. Ce n'est pas exactement ce qu'on classe d'habitude comme un politique fiscale contractive...



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: moisankarl (IP Loggée)
Date: 15 juin 2012 à 15h03

Bonjour
Je suis nouveau ici, et quelque peu débutant en économie.
Je trouve ces questions aussi complexes qu'essentielles.
Cependant je ne me lancerais dans une réponse à ces questions trop complexes pour moi.
Néanmoins je suis surpris de ne pas voir mentionné dans vos réponses le terme "confiance". Car à mon humble avis c'est bien de cela dont il s'agit. En effet, c'est par la confiance des investisseurs vis à vis des capacités de remboursement des citoyens US d'une part et de la sincérité des banques ayant cautionné ces crédits d'autre part qui à permis la constitution de la bulle des "subprimes". Après son éclatement nous étions et nous sommes toujours sur un effet inversement proportionnel de défiance.
"Ce qui est dangereux ce n'est pas d'emprunter mais de ne pas pouvoir le faire". Citation de, je ne sais plus qui.



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: elvin (IP Loggée)
Date: 15 juin 2012 à 15h03

@moisankarl
Mais plus on a emprunté, et moins on peut continuer à le faire. Question de confiance en effet, surtout quand on en arrive à devoir emprunter pour payer les intérêts de ses dettes...



Re: Dettes publiques et politiques d’austérité
Publié par: Optimum-Belgo (IP Loggée)
Date: 15 juin 2012 à 16h04

@moisankarl : la confiance se mesure par les taux d'intérêt. Les taux d'intérêt sur la dette grecque sont si élevés qu'ils traduisent une très grande défiance vis-à-vis de l'Etat grec. D'autres Etats, dont la France et les USA par exemple, on des taux d'intérêt très bas qui traduisent au contraire une très grande confiance.





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