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Exercices d'éco basés sur Jancovici
Publié par: Gu Si Fang (IP Loggée)
Date: 03 décembre 2012 à 13h01

J'ai parcouru ce WE le dernier livre de Jean-Marc Jancovici. Il contient des erreurs de raisonnement économique qui pourraient être utilisés à des fins pédagogiques.



Première affirmation : l’énergie joue un rôle important dans notre vie. Elle a bouleversé radicalement l’organisation de l’économie et de la société en général, et elle a permis à notre niveau de vie de s’envoler. Si l’énergie devait devenir plus rare, cela aurait très probablement des effets terribles. JMJ a raison sur ce point.



Deuxième affirmation : l'énergie va devenir plus rare, c'est certain et c'est pour bientôt. Le raisonnement de JMJ est physique : si on prélève de l’eau régulièrement dans une grande baignoire, le débit ne peut pas augmenter indéfiniment sans vider la baignoire. En même temps, il note que le prix de l'énergie ne cesse de baisser à long terme et écrit : « le prix réel de quelque chose […] représente le temps qu’il faut travailler pour se payer la chose concernée. À l’aune de cet étalon, le prix réel de l’énergie mécanique a été divisé par 30 à 100 depuis un siècle et demi ! » Pourquoi le prix reste-t-il faible si les arguments physiques de JMJ sont bons ? Qui a raison : JMJ ou les marchés ?



Troisième affirmation : si l'énergie devient rare (en admettant que ce soit le cas), il faut une politique économique pour "gérer" et non "subir" la transition. J'en étais resté à l'idée que l'intervention publique pouvait être justifiée dans ce domaine pour des raisons d'externalités, mais pas par des arguments d'efficience économique.



Quatrième affirmation : « Pétrole, gaz et charbon sont tout aussi gratuits que vent et soleil, seul l’effort humain pour y accéder nous coûtant quelque chose ! » Economiquement, c'est totalement faux parce que les énergies fossiles sont rares : leur utilisation pour un usage nous prive d'un autre usage. Ce n’est donc pas parce que les énergies fossiles nous sont données par la nature qu’elles ont un coût nul. Leur "coût de production" passé n'a aucune incidence sur leur prix actuel. Ce point est crucial et illustre la notion de rareté et de coût d'opportunité.



Cinquième affirmation : le poids de l'énergie dans l'économie peut être mieux apprécié du point de vue physique que du point de vue économique. C’est un thème qui revient souvent : « Si demain nous n’avions plus ni pétrole, ni gaz, ni charbon, ce n’est pas 4 % du PIB que nous perdrions, mais près de 99 % ! […] L’énergie consommée dans un secteur industriel donné ne représente peut-être que 10 % de ses coûts, mais elle pilote 100 % de sa production ! C’est la raison pour laquelle une vision « purement PIB » de l’énergie ne peut pas rendre compte des processus qui apparaissent en cas de tension physique sur l’approvisionnement énergétique. » L'erreur est que l'on n'a jamais à choisir entre 1) utiliser du pétrole et 2) ne pas utiliser de pétrole, mais entre 1) utiliser un baril de pétrole et 2) ne pas utiliser ce baril de pétrole. Les choix se font à la marge. Ce point illustre les erreurs auxquelles on aboutit lorsqu'on méconnait le raisonnement marginal des économistes.



Qu'un ingénieur aussi diplômé puisse faire de telles erreurs laisse perplexe sur l'enseignement de l'économie et incite à être modeste. J'espère ne pas avoir fait trop d'erreurs moi-même dans ce post !



Modifié 1 fois. Dernière modification 03/12/2012 à 14h02 par Gu Si Fang.





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